C’est difficile de se souvenir d’un événement en particulier parce que ça arrive souvent, malheureusement. La première fois que j’ai été agressée verbalement, c’était durant ma première semaine de mentorat.

Un patient menaçait de me violer, même s’il n’allait pas vraiment faire quelque chose. Il était sur une civière, et il était très, très saoul. Je n’étais exposée à aucun danger physique, ou du moins, c’est ce que j’espérais. Je travaillais avec une autre ambulancière. La seule raison pour laquelle je comprenais ce qu’il disait, c’était parce qu’il parlait une langue que je connaissais, ce qui n’était pas le cas de l’autre ambulancière.

Je ne savais tout simplement pas quoi faire. Je n’ai pas été formée sur quoi faire dans ces cas-là quand j’ai commencé à travailler, alors je n’ai jamais vraiment fait quelque chose. J’en ai parlé à d’autres ambulancières, mais je ne crois pas qu’on m’ait donné d’étapes à suivre comme « oh, voici ce que tu dois faire ».

Depuis, des patients m’ont crié après, m’ont agrippée et m’ont dit des choses terribles un nombre incalculable de fois. Ce n’est souvent pas de leur faute parce que ces personnes ne sont pas dans un état d’esprit raisonnable. Mais lorsqu’une personne souffre de problèmes médicaux, de dépendances, ou peu importe, on en subit parfois les conséquences. Dans mon cas, la plupart du temps, je fais juste penser aux problèmes que vivent les patients et c’est là que le blâme diminue.

Je crois que la violence des patients en milieu de travail n’est pas suffisamment soulignée dans le domaine des soins paramédicaux. La raison, c’est que même lorsqu’un patient nous agresse—que ce soit physiquement, verbalement ou sexuellement—les chances de se rendre en cour et d’avoir gain de cause sont très faibles.

D’ailleurs, il n’y a pas beaucoup d’ambulancières. Lorsque je faisais mon préceptorat, durant les 500 dernières heures de travail sur le terrain, mes deux mentors étaient des hommes.

C’est vrai que ça me rend un peu blasée ou épuisée. Heureusement pour moi, je ne crois pas que ça m’affecte au quotidien. Je ne fais pas de cauchemars ou quoi que ce soit, mais il m’arrive d’être un peu moins heureuse d’aller au boulot, ou de travailler avec certains types de patients. Lorsque je réponds à un appel pour une personne qui est très saoule, je suis toujours un peu plus prudente et un peu plus paranoïaque. J’ai connu des situations où une personne agissait de façon très obscène à mon égard et où un ambulancier ou une autre personne a pris la relève parce que ça dépassait les bornes.

J’aime vraiment ce que je fais—j’ai la chance d’être là pour les gens dans certains de leurs moments les plus vulnérables. C’est quelque chose que j’apprécie vraiment. Je ne crois pas que je quitterai mon emploi. Il y a des services paramédicaux qui créent des groupes de travail ou des organismes pour faire pression sur la haute direction, tant pour la reconnaissance que pour la création de stratégies et de politiques en milieu de travail qui permettraient de gérer les agressions de la part des patients.

Je demanderais aux gens qui ont été confrontés à une agression au travail en tant qu’ambulanciers de participer à ces organismes qui font pression sur la haute direction. Je souhaite aussi que les gens fassent valoir ça à l’échelle provinciale parce que plus nous aurons de voix, plus nous recevrons de la reconnaissance, et plus nous en parlerons, plus le public sera conscient de ce qui se passe.